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Accueil > Articles en ligne > Le port fluvial de Villeneuve-le-Roy (2)
Un article en six parties :
1) Pourquoi le port de Villeneuve ?
2) Conception et documentation
3) Un principe de base : l’échelle sensible
4) Un peu de technique et des matériaux
5) Principes d’assemblage et outillage
6) À voir dans le flacon (et sources icono)
Ce travail est dédié à François Beaudouin.
Gérard Aubry, d’octobre 2013 à mai 2014
La Bouteille d’abord…
J’avais en réserve ce beau et grand flacon ancien en verre soufflé d’une contenance de 30 litres, et d’un diamètre moyen de 25 cm, pour une longueur de 80 cm, provenant probablement d’une fabrique d’huiles essentielles pour parfums de Grasse pour parfum de Provence. — Trente litres ? S’il avait contenu du Champagne, ce serait donc un melchizédech, la plus volumineuse des bouteilles de vin. Mais nous sommes en Bourgogne où leur format commence au piccolo de 0,2 litre et s’arrête au melchior de 18 litres, ce qui est déjà pas mal … et à consommer avec modération. Mais heureusement, l’eau de Lavande ne se boit pas !
Le verre de la bouteille, achetée à prix d’or dans les années 1985-90 chez un antiquaire de la rue Jacob à Paris, est d’une telle finesse que je n’ai pas osé l’utiliser depuis ce temps. Au vrai, je la destinais à accueillir un grand voilier à cinq mâts tels France I ou France II, construits et armés respectivement 1890, pour l’armement Bordes, et en 1911 pour la Société Anonyme des Navires Mixtes Prentout-Leblond : très semblables aux yeux du profane, leur principale différence visible résidait dans la présence de six voiles par mât pour le premier et cinq voiles pour le second, Mais leurs proportions ne s’adaptaient pas d’une manière parfaitement satisfaisante à celles de la bouteille.
Alors, va aujourd’hui pour l’Yonne et le port de Villeneuve. Mais par où commencer ?
Textes et images
Première étape : trois mois passés à collecter et à étudier la documentation parmi toutes les publications disponibles en librairie, les archives départementales, les Études Villeneuviennes, les trop rares cartes, plans et autres dessins d’époque. Pour la Ville proprement dite : quelques lignes nostalgiques de François-René de Chateaubriand à propos de son ami le moraliste Joseph Joubert, les descriptions d’Étienne Menu de Chomorceau, Lieutenant Général de Villeneuve puis député à la Constituante de 1789, et plus tardivement d’Eugène Viollet-le-Duc, (qui y ajoute ses reconstitutions graphiques des portes), permettent d’imaginer ce que devaient être les berges de l’Yonne au pied de la muraille alors en cours d’intégration au milieu urbain.
« Murailles décrépites, tours à demi rasées » (Chateaubriand), les hourds ont été démontés au XVIe siècle pour remployer leurs tuiles et leurs bois de charpente. On ne peut plus faire à pied le tour de l’enceinte par le chemin de ronde ni même « y jouer aux boules » (Menu de Chomorceau). Une aquarelle anonyme, une autre de Sophie Joubert des années 1820, suivis d’un dessin de Jean-François Dumas de 1845, publiés dans les Études Villeneuviennes, donnent une image tout à fait exploitable de l’état entre ces dates. Ce qui présente encore un aspect médiéval, même ruiné en 1820-1840, le présentait - a fortiori - aussi en 1780.
Le reste est affaire d’imagination, une vue d’ensemble aussi représentative que possible et un détail inventé. Mais que telle porte ou fenêtre, aient été là ou 10 m plus loin, faites de pierre, de briques ou de bois selon les besoins et les moyens du propriétaire, ne change guère l’allure générale du port.
Les plans cadastraux et d’alignement ont permis de situer les poternes qui donnaient accès à la berge. Le crénelage, inspiré des murailles de Carcassonne sensiblement de même époque et même architecture, laisse voir les archères et les trous de boulin qui recevaient les corbeaux de support des hourds. Les ponts-levis des autres portes de Villeneuve avaient depuis longtemps fait place aux ponts dormants de bois puis de pierres. Ici, l’espace situé en dessous de l’ancien pont-levis, entre la porte et le pont dormant de pierre a été comblé. Ce comblement a interrompu la berge au pied de la porte. Un escalier étroit vers l’aval, une rampe vers l’amont, permettaient d’accéder à la rivière. De ce fait, le halage s’interrompait au pont. L’on devait donc dételer les chevaux, les faire entrer dans la ville par la poterne, la rue Jorge Semprún (anciennement rue Bertram puis Bertrand), prendre à droite la rue Bretoche (anciennement rue de la Pescherie ou rue de la Poterne entre les murs), encore à droite, la rue du Pont (actuelle rue Joubert), ressortir par les pilastres de la porte du Pont et redescendre à gauche par la rampe pour les réatteler.
L’actuel passage routier sous la première arche du pont est en effet postérieur à l’époque qui nous intéresse. Mais les deux petites arches, aujourd’hui remplacées par une seule, subsistaient. La croix des mariniers qui date de 1735, n’apparaîtra dans notre scène que grâce à un hardi rapprochement d’une arche vers la porte.
À suivre…
3) Un principe de base : l’échelle sensible
4) Un peu de technique et des matériaux
5) Principes d’assemblage et outillage
6) À voir dans le flacon (et sources icono)